Démocratie énergétique

Pourquoi impliquer les citoyens et les acteurs locaux dans la transition énergétique ?

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On parle de plus en plus d’implication des citoyens, des communes, des petites entreprises, … dans la transition énergétique. C’est l’idée que ces acteurs ne soient plus restreints au rôle de simple « payeur de facture », et jouent un rôle plus actif sur le marché de l'énergie, en produisant,  ou en vendant eux-mêmes de l’énergie, en étant rémunéré pour faire varier leur consommation en fonction de la production d’énergie disponible sur le réseau, ... Ceci, aussi bien individuellement, qu’à travers des structures collectives comme par exemple, les communautés  d’énergie. Par ce biais, ces acteurs ont une influence sur le fonctionnement du système énergétique. Ces structures collectives constituent aussi des espaces de débat public sur le fonctionnement de ce système. 

Parallèlement à cette évolution du rôle de ces acteurs s'est développé le concept de "Démocratie énergétique". Bien que différentes définitions (parfois floues ou contradictoires) existent, ce concept se décline en général en plusieurs principes :

  • Accès universel & Justice sociale: Tout le monde a accès à une énergie suffisante et abordable. La réduction de la consommation va de pair avec l'élimination de la pauvreté énergétique. Le système énergétique doit donner la priorité aux besoins des communautés, des ménages et des personnes marginalisées.
  • Énergie renouvelable, durable & locale : Les ressources en combustibles fossiles doivent être laissées dans le sol. Le bouquet énergétique doit être aussi renouvelable que possible et, à terme, qu'il le soit à 100 %.
  • Propriété publique & sociale : Répondre aux besoins des personnes tout en restant dans les limites planétaires nécessite que de nouvelles formes de propriété publique - par les municipalités, les collectifs de citoyens et les travailleurs - émergent pour servir l’intérêt public. Les moyens de production doivent être socialisés et démocratisés.
  • Prix juste & emplois vertueux : La transition énergétique doit être codirigée par les travailleurs afin de garantir que les emplois dans le secteur des énergies renouvelables soient créés, syndiqués et payés équitablement.
  • Sources : https://energy-democracy.net/

Quel est l'impact de cette évolution?

L’élargissement du rôle de consommateur a un impact potentiel majeur : rendre le marché de l’énergie beaucoup plus démocratique, en vue d’accélérer la transition vers un système énergétique propre, inclusif et de plus en plus résilient.

En effet, le fait que le système énergétique soit encore aujourd’hui aux mains de grands groupes énergétiques, très souvent impliqués dans les énergies fossiles, dont le profit à court terme est le principal objectif et ayant une grande capacité d’influence auprès des décideurs politiques, constituent un frein majeur vers cette évolution. L’arrivée d’acteurs locaux, se réappropriant les moyens de production et décentralisant le marché de l’énergie pourrait bousculer les équilibres de pouvoir existants et donc changer sérieusement la donne.

 

Comment est-on arrivé là ?

En Belgique, le système énergétique s'est progressivement construit à partir d'intercommunales et de producteurs locaux. D'un point de vue technique, le réseau a ainsi été conçu de manière centralisée, s'adossant à des centrales de plus en plus puissantes jusqu'aux premières centrales nucléaires dans les années 1970, suscitant dès le début des oppositions et des manifestations envers cette nouvelle source d'énergie. Outre l'énergie nucléaire, l'approvisionnement énergétique de la Belgique dans l'après-guerre a également été caractérisé par une importation du Moyen-Orient de grandes quantités de pétrole et de gaz bon marché. Aucun investissement significatif dans les énergies renouvelables n'a été réalisé, même après les crises pétrolières. Au milieu des années 80, les trois seules compagnies d'électricité en Belgique ont fusionné pour former Electrabel en 1990, qui a ainsi acquis un quasi-monopole.

Le mouvement coopératif est né peu de temps après. En Flandre, des citoyens engagés ont créé leur première coopérative en 1991 : Ecopower. Depuis lors, de plus en plus de citoyens se sont organisés, en vue de s’impliquer eux-mêmes dans la transition énergétique, afin de l'accélérer, plutôt que d'attendre que les grands acteurs traditionnels le fassent. A Bruxelles, les initiatives citoyennes relatives à l’énergie restent encore peu nombreuses.

Fin 2018, l'Union européenne a adoptée le “Clean Energy Package” (CEP), un ensemble de propositions législatives visant à fournir un cadre au secteur énergétique de l'UE afin d'accélérer la transition vers l'énergie renouvelable en Europe et de mettre le consommateur au centre du système énergétique. La mise en œuvre du CEP devrait ainsi complètement reconfigurer le paysage énergétique dans les prochaines décennies, en permettant à une plus grand partie de la population de produire, stocker, consommer et vendre de l'énergie renouvelable sans être soumis à des charges financières disproportionnées et à des procédures discriminatoires.

C’est donc surtout la conséquence d’évolutions socio-politiques et législatives relatives à l’énergie qui ont contribué à élargir le rôle des citoyens dans le système énergétique.

C’est également une conséquence de l’évolution des technologies de production de l'énergie. En effet, les énergies renouvelables, dont les centrales de production peuvent être de très petites tailles, rendent possible cet élargissement du rôle du consommateur, contrairement aux centrales au charbon, au gaz ou nucléaire qui vu leurs tailles, ainsi que leurs coûts de construction et de fonctionnement sont uniquement la propriété de grosses entreprises. En outre, les compteurs communicants élargissent aussi le champ des possibles, en assurant le mesurage par exemple d'un partage de l’énergie entre voisins, ou encore de suivre sa consommation de manière extrêmement rapprochée, ce que les compteurs classiques, relevés annuellement, ne permettent pas.